Ce texte a été monté par Isabelle Dufresne-Lienert, directrice du développement du scoutisme de l’Association des scouts du Canada, à la suite des recherches et aux consultations réalisées dans le cadre du Jamboree leadership + Rencontre nationale d’automne 2024, des sondages #OnSéCOUTe, une consultation auprès de l’OMMS et du travail de renouvèlement du programme de formation. Vous trouverez toutes les références, instances de consultation et documents consultés en annexes.
Si les enfants et les jeunes de 7 à 25 ans sont au cœur du programme scout, quelle est la place des adultes? Peuvent-ils, eux aussi, se définir comme des scouts?
La question peut sembler simple, mais elle touche à l’essence même de ce que signifie être un scout et à la fonction des adultes dans le mouvement scout. En comprenant mieux sa fonction, chaque adulte peut mieux livrer notre mission : le développement intégral des jeunes francophones au Canada.
Au sein de l’Association des Scouts du Canada (ASC), le scoutisme n’est pas qu’un programme pour jeunes; c’est une communauté intergénérationnelle. Les adultes, qu’ils soient bénévoles ou employés, jouent un rôle clé dans l’organisation, l’animation et le soutien des activités scoutes.
Mais est-ce suffisant pour dire qu’ils sont eux aussi des scouts? Pour répondre, il faut se pencher sur deux piliers fondamentaux du scoutisme au sein de la méthode scoute : les valeurs et le partenariat éducatif.
Le scoutisme repose sur la méthode scoute : promesse et loi, apprentissage par l’action, travail en petits groupes, nature, engagement communautaire, cadre symbolique, progression personnelle, et partenariat éducatif.
La Promesse et la Loi scoute forment la colonne vertébrale de la méthode scoute. Elles incarnent des principes universels : respect, justice, dépassement et confiance. Un adulte qui agit en accord avec ces valeurs, dans sa vie personnelle comme dans sa fonction au sein des scouts, peut tout à fait revendiquer une identité scoute.
C’est en adoptant ces valeurs, en les retransmettant et en étant un modèle inspirant qu’un adulte se rapproche de ce que signifie être scout.
Les éléments de la méthode scoute ne sont pas réservés aux jeunes : ils encadrent l’approche pédagogique et andragogique proposée dans les scouts.
L’élément du partenariat éducatif est particulièrement essentiel : il définit la fonction de l’adulte dans la méthode scoute.
Ça veut dire quoi être un partenaire éducatif ? Ça veut dire que l’adulte dans le scoutisme est :
Le jeune vit le programme des jeunes – l’adulte fait vivre le programme des jeunes. L’adulte dans le scoutisme construit avec les jeunes une communauté intergénérationnelle, où chacun apprend, partage et progresse ensemble.
La réponse à la question « Est-ce qu’un adulte dans le scoutisme est un scout? » dépend donc de la perspective.
Dans le contexte de l’ASC, les adultes ne sont pas uniquement des soutiens ou des encadrants; ils font partie intégrante de la communauté scoute. En réalité, les adultes incarnent souvent l’idéal scout à travers leur rôle de mentor et de modèle pour les jeunes. Leur identité de scout se manifeste différemment, mais elle est tout aussi importante.
Alors, à toutes les personnes qui vivent avec les valeurs scoutes en s’engageant dans le mouvement : oui, vous êtes des scouts par vos valeurs, et votre contribution est essentielle pour inspirer les générations futures à vivre selon la Promesse et la Loi. Cependant, si vous avez plus de 25 ans, votre fonction n’est pas la même qu’un jeune de 7 à 25 ans : votre fonction comme adulte dans le scoutisme est avant tout de faciliter l’atteinte de notre mission, que ça soit en faisant vivre le programme des jeunes directement auprès des jeunes de 7 à 25 ans, ou en soutenant les adultes ou la structure qui permet à ce programme de se vivre.
Comme association scoute nationale, nous avons une structure, des procédures et des systèmes en place pour atteindre notre mission. Alors quels enjeux sont impliqués dans la conversation autour de la question « Est-ce qu’un adulte dans le scoutisme est un scout? » ?
Beaucoup de débats sont sur les termes utilisés. Il faut rediriger la conversation de mots vers les fonctions et nos rôles dans la mission du scoutisme.
À travers le temps, plusieurs termes ont été utilisés pour désigner les adultes dans le scoutisme. Baden Powell lui-même a utilisé : « Instructor », « Scoutmaster », « Leader ». Quoiqu’adoptés comme traductions dans plusieurs associations francophones, les termes « chef » et « leader » ne sont pas recommandés par l’OMMS afin de favoriser les relations de partenariat éducatif plutôt que d’autorité et de centrer le mouvement sur le développement du leadership chez les jeunes. Pour en apprendre davantage, consultez : Le terme adulte dans le scoutisme. Chez Scouts Canada, ils ont adopté le terme « Scouter » pour les adultes dans le scoutisme. En français, un nom qui sonne comme « scooter » (mobylette) n’est pas très gagnant !
Pour se coordonner avec l’OMMS, comme défini dans leur glossaire, l’ASC utilise le terme « adulte dans le scoutisme » pour parler de professionnels ou « bénévoles responsables du développement, de l’animation ou de la mise en œuvre du programme jeunesse, qui soutiennent d’autres adultes ou qui soutiennent le développement de l’organisation. »
L’ASC utilise le terme « scout » pour référer aux jeunes de 7 à 25 ans qui vivent le programme des jeunes.
En précision, un adulte dans le scoutisme est une personne qui a une fonction active au sein de l’ASC : ça inclut donc également nos jeunes bénévoles de moins de 18 ans. Un scout de 25 ans et moins peut donc être adulte dans le scoutisme.
Si l’information concerne une fonction spécifique, l’ASC utilise le nom de la fonction, ex. : animateur ou animatrice, commissaire, etc. Dans la mesure du possible, pour diminuer les doublets, l’ASC utilise de plus en plus aussi des termes épicènes, ex. : membre de l’équipe d’animation, responsable de groupe, etc.
Dans le scoutisme, les adultes vivent des aventures, se font des amis, et se développent comme personne. Il ne faut cependant pas oublier que la fonction d’adulte existe avant tout pour accompagner les jeunes dans leur développement. Il peut parfois être tentant, et ce même inconsciemment, de tomber dans certains pièges.
Cela peut survenir lorsque des bénévoles s’investissent principalement pour satisfaire leurs propres aspirations, par exemple en privilégiant des activités qu’ils aiment ou en dirigeant des projets selon leurs goûts personnels, au détriment des besoins et intérêts des jeunes. Cela peut aussi se manifester par une appropriation excessive des rôles de décision, privant les jeunes de l’autonomie et de l’apprentissage nécessaires.
De la même manière, les « clubs sociaux » apparaissent lorsque les activités adultes deviennent des moments de socialisation prioritairement orientés vers leurs propres plaisirs. Si l’aspect communautaire est essentiel dans le scoutisme, il doit toujours rester ancré dans une mission éducative, où le temps passé ensemble profite avant tout aux jeunes. Rien n’empêche de se rencontrer à l’extérieur des scouts entre amis et amies !
Il est essentiel de veiller à ne pas glisser vers un scoutisme pour adultes, où les traditions, rituels ou activités conçus pour les jeunes sont récupérés ou exagérés par les adultes, au point d’en perdre leur valeur éducative. Des exemples comme les camps ou la totémisation, lorsqu’ils sont détournés de leur objectif initial, risquent de brouiller les rôles et d’éloigner le mouvement de sa mission.
Bien sûr, certaines activités destinées aux adultes sont nécessaires. Les conseils d’animation, formations, salons de district et autres événements ont leur raison d’être : permettre aux adultes de développer leurs compétences pour offrir un programme de qualité et mieux accompagner les jeunes. Ces moments gagnent en valeur s’ils s’inspirent des principes de la méthode scoute : créer un sentiment de communauté, de valeurs partagées, de travail en petits groupes, etc. Par contre, ils doivent toujours rester centrés sur leur finalité : renforcer les capacités des adultes à remplir leur rôle de partenaires éducatifs.
Le rôle des adultes dans le scoutisme est clair : ils sont guides, mentors et modèles. Ils n’ont pas à reproduire ou s’approprier l’expérience des jeunes, mais plutôt à les soutenir dans leur développement. C’est en gardant cette distinction que le scoutisme demeure un espace véritablement conçu par et pour les jeunes.
Pour éviter ces dérives, il est essentiel que chaque adulte dans le scoutisme :
Les responsables des adultes ont également une mission essentielle de recentrer les actions des adultes sur les jeunes et d’assurer que les adultes qu’ils supervisent comprennent leur fonction. De cette manière, tout adulte peut s’assurer que sa contribution reste pertinente, significative et alignée avec l’essence même du scoutisme.
Ces concepts s’appliquent aussi aux jeunes bénévoles qui sont scouts ET adultes dans le scoutisme. En tant que Pionniers, Aventuriers, ou Routiers, les jeunes sont encouragés à vivre le programme des jeunes. Mais quand ils prennent leur fonction d’animation, ils doivent axer leur temps sur soutenir les jeunes.
Les adultes dans le scoutisme qui ont été éclaireurs ou pionniers ont déjà fait leur promesse. Mais qu’en est-il pour un adulte qui n’a pas été scout ? Devrait-il faire sa promesse d’adulte?
On demande à chaque adulte de s’engager, au début de sa fonction, vers la mission du scoutisme. Particulièrement dans la fonction d’animateur ou animatrice, ils devront être des modèles pour les jeunes. Est-ce que l’entraineur de hockey est le joueur de hockey? Est-ce que l’enseignante est l’étudiante? Bien entendu, leurs fonctions sont différentes, mais le fait d’avoir bénéficié du même programme peut les aider. Il en va de même dans ce cas-ci. Faire un engagement pour un adulte qui n’a pas été scout souligne qu’il s’engage dans une démarche continue de développement personnel, de service et de respect des valeurs scoutes tout comme le jeune. Ceci favorise le sentiment d’appartenance et de fierté.
Cependant, il est essentiel de distinguer la promesse adulte de celle des jeunes. Là où la promesse des jeunes représente une entrée dans le mouvement et un cheminement éducatif, la promesse adulte doit refléter un engagement à servir les jeunes et à incarner les valeurs du scoutisme à travers leur rôle de mentor et de facilitateur. Ce moment symbolique leur rappelle leur rôle en tant que modèles, guides et partenaires éducatifs. Une promesse adulte peut se faire dans la signature de l’entente de fonction ou dans un moment de réflexion personnelle et non seulement dans une cérémonie protocolaire. Faire une promesse adulte, c’est accepter de porter les valeurs scoutes avec humilité, en mettant les jeunes au centre de leurs actions, tout en s’engageant à apprendre et à grandir tout au long de leur parcours scout.
Cette réflexion implique : que devrions-nous faire avec un adulte qui ne démontre pas les valeurs scoutes ? Pour être cohérent avec notre mission, un adulte qui ne démontre pas les valeurs scoutes n’agit pas comme modèle pour les jeunes et ne répond donc pas au cœur de sa fonction. La personne responsable a comme responsabilité de faire le point avec le bénévole, de l’outiller et de l’aiguiller vers des pistes d’amélioration, et de prendre une décision sur la poursuite de l’implication, selon les mesures prévues dans la politique PP102-2017-03 – MESURES DISCIPLINAIRES, SUSPENSION ET EXPULSION D’UN MEMBRE ADULTE DANS LE SCOUTISME.
Les symboles scouts, comme le foulard et l’uniforme, incarnent l’appartenance, l’engagement et les valeurs du mouvement. Cependant, leur usage chez les adultes doit être réfléchi pour éviter de rigidifier les traditions, ce qui pourrait rendre le scoutisme moins attrayant autant pour les jeunes que pour des adultes que nous recrutons et freiner leur adaptation aux réalités contemporaines.
Le foulard, symbole universel du scoutisme, peut être porté par tous les adultes impliqués : bénévoles, membres du personnel ou partenaires. Il marque leur engagement à soutenir la mission éducative du mouvement. Il n’est pas réservé aux personnes qui ont fait leur promesse. Cependant, il est essentiel que le foulard soit porté dans des contextes appropriés, qui respectent nos politiques, comme lors d’activités officielles ou d’événements scouts, pour maintenir son caractère symbolique. Il ne doit pas être perçu comme un privilège réservé à certains, ou un simple accessoire. Il ne doit pas être porté dans des activités “non scoutes”, ex.: un groupe d’adultes dans le scoutisme peuvent aller boire un verre dans un bar ensemble comme amis et parler des idées pour le camp d’hiver qui arrive, mais sans porter ni le foulard ni l’uniforme.
Pour l’uniforme, son port varie selon les rôles et les contextes. Les animateurs et responsables d’unités, par exemple, peuvent le porter pour souligner leur rôle actif auprès des jeunes ou dans la représentation du scoutisme auprès de public externes. Les adultes en soutien administratif ou logistique, eux, peuvent opter pour une tenue plus sobre, comme un insigne scout ou simplement le foulard, afin de refléter leur engagement sans confusion sur leur fonction.
Si reconnaître la fierté des adultes à porter le foulard scout ou leur uniforme peut renforcer leur engagement et leur fierté, il est crucial en contrepartie de penser continuellement à la perception du scoutisme qui doit avant tout être vu comme un mouvement d’éducation non formelle qui développe les jeunes, particulièrement les adolescents, comme citoyens actifs. En comparaison au foulard scout, l’uniforme a une connotation plus traditionaliste. L’uniforme scout porté par des adultes peut renforcer des stéréotypes – perception comme un élément désuet ou enfantin, associé à une image rigide, traditionnelle, une fermeture au changement, aux modèles autoritaires ou militaires – créant une image décalée ou rigide du mouvement, éloignée des réalités modernes des jeunes, ce qui peut décourager de potentiels bénévoles, jeunes ou partenaires de s’y associer. Le coût ou la disponibilité de l’uniforme peut aussi représenter une barrière pour les bénévoles adultes qui n’œuvrent pas directement auprès des jeunes. L’obligation de porter l’uniforme peut être perçue comme un frein à leur engagement.
Pour ces raisons, l’ASC encourage une utilisation plus flexible de l’uniforme :
L’ASC travaille actuellement sur un ensemble de projets pour améliorer l’expérience bénévole. Ce point se démarquait lors de nos sondages #OnSéCOUTe.
Le travail sur la place de l’adulte dans le scoutisme s’inscrit dans ce processus : une meilleure compréhension des fonctions crée une meilleure expérience.
Nous avons travaillé avec des centaines de bénévoles jusqu’à présent, et nous sommes toujours ouverts à de nouvelles voix. Ça nous intéresse? Voici les projets en cours sur l’expérience bénévole dans l’ASC et comment vous pouvez y contribuer.
Pour un aperçu, consultez le Tableau Gantt des projets sur l’expérience bénévole pour l’année 2024-2025 : 2024-2025 Les projets de l’adulte dans le scoutisme.pdf
Pour standardiser notre offre bénévole à travers l’ASC, nous avons des politiques et des cadres. L’ASC procède donc cette année, avec l’aide de la table des ressources adultes, des commissaires et de comités bénévoles nationaux à la révision d’un ensemble de politiques et de cadres qui touchent à l’encadrement des adultes.
Voici la description plus détaillée du projet ici :
2024-2025 Révision des politiques de l’adulte dans le scoutisme_v20241128.pdf
Afin que chaque adulte comprenne sa fonction, de la formation est disponible offrant un grand soutien. Des ressources spécifiques doivent également être allouées pour former des adultes qui n’ont pas été scouts dans leur jeunesse, afin de diversifier le bassin de bénévoles tout en maintenant les standards du mouvement.
Pour en apprendre plus sur le projet :
https://scoutsducanada.ca/nouveaute/transformer-notre-formation-pour-benevoles/
Fatigués de courir après les conformités pour un nouveau bénévole ? Pour rendre l’expérience bénévole plus facile et appuyer les districts dans leur mandat, le centre national développe actuellement une plateforme en ligne pour centraliser les conformités en les rendant disponibles en un seul endroit pour tous les bénévoles.
Pour en apprendre plus sur le projet :
https://scoutsducanada.ca/nouveaute/le-point-de-depart-nouveau-portail-dintegration-et-de-validation-des-conformites-pour-les-benevoles/
Le projet a été piloté dans 3 districts et sera prêt pour lancement en hiver 2025.
Ah ce fameux SISC 2.0… il est rendu où le projet ? Tous les détails sont ici.
https://scoutsducanada.ca/nouveaute/developper-le-sisc-2-0-pour-optimiser-notre-gestion-des-membres/
Nous travaillons avec la compagnie Décizif pour livrer le contenu. En janvier 2025, nous commençons le pilotage dans des districts sélectionnés de la nouvelle plateforme.
En conclusion, en tant que personne ayant porté plusieurs chapeaux dans le scoutisme – scout, animatrice, membre de comité de district, responsable de comité national, stagiaire et employée – je ressens profondément la force du dicton « scout un jour, scout toujours ». Chaque rôle m’a appris quelque chose d’unique, mais aujourd’hui, en tant qu’adulte, je me rappelle que ma mission première est de soutenir le développement du plus grand nombre possible de jeunes francophones au Canada. Mon objectif est de leur permettre de grandir grâce à ce programme exceptionnel qui, depuis des générations, a façonné des millions de jeunes à travers le monde.
Ensemble, avec vous qui partagez cette même mission, je suis convaincue que nous avons le pouvoir de créer un impact durable. J’ai hâte de cheminer avec vous en 2025, d’apprendre à vos côtés et de contribuer, humblement, à faire rayonner le scoutisme pour les jeunes d’aujourd’hui et de demain.
Isabelle Dufresne-Lienert
Directrice du développement du scoutisme
Direction.scoutisme@scoutsducanada.ca